L'origine de Chaussure
Un usage antique
La chaussure en usage du temps d'Abraham consistait dans des espèces de sandales attachées avec des courroies. Les Grecs, dès les siècles héroïques, se servaient de souliers, mais non pas habituellement. Ils ne les prenaient que lorsqu'ils voulaient sortir. On ne voit pas bien, dit Goguet, quelle pouvait être la forme de ces souliers. Les hommes portaient aussi des espèces de bottines faites de cuir de bœuf, qui se mettaient à cru sur la jambe.
Chez les anciens, la chaussure des femmes était ou des souliers ou de simples sandales ; mais la forme et la matière dont ils étaient faits ont beaucoup varié. On sait que les Égyptiens ont employé pour leur chaussure l'écorce de l'arbre appelé Papyrus.
Le port des chaussures dans la Grèce ancienne
Une loi de Lycurgue ordonnait aux Spartiates de marcher nu-pieds : aussi ne portaient-ils des souliers que lorsque, devenus hommes, ils étaient obligés de marcher de nuit, d'aller à la chasse ou à la guerre. Au reste, leur chaussure était différente de celle des autres Grecs ; elle ressemblait assez à un soulier plat qui envelopperait tout le pied : elle était pour l'ordinaire de cuir rouge, mais simple et sans ornement. La chaussure des femmes était un peu plus haute que celle des hommes, mais moins que celle des filles, qui en portaient une fort élevée et qui approchait du cothurne.
A Athènes, ceux qui se piquaient de mener une vie plus austère que les autres ne portaient jamais de souliers que lorsqu'il faisait grand froid ou qu'ils avaient à passer par des chemins fort rudes. Cependant les Athéniens avaient différentes sortes de chaussures : les unes couvraient entièrement le pied, les autres en laissaient une partie découverte ; elles étaient communes aux deux sexes. La matière des chaussures à Athènes était de cuir préparé : la couleur uniforme pour les hommes était le noir ; les femmes en portaient de différentes couleurs, qu'elles faisaient orner d'or, d'argent, d'ivoire et de pierreries. Les Grecs avaient une chaussure particulière pour les gens de guerre ; elle ressemblait à une bottine sans soulier, couvrait toute la jambe, et était ordinairement d'un cuir fort dur.
L'usage des chaussures dans la Rome antique
Les anciens Romains, à l'imitation des Grecs, ne portaient des souliers ni à la ville, ni à la campagne ; l'usage n'en vint à Rome qu'avec le luxe et les richesses de l'Asie. Ceux qui conservèrent les mœurs austères des beaux temps de la république allaient toujours nu—pieds. Le luxe et la mollesse varièrent souvent la mode des chaussures à Rome. On lit dans Cicéron que, de son temps, il y avait une sorte de souliers à la grecque, qu'on appelait sicyonium, dont se paraient les jeunes débauchés, et que les personnes graves regardaient comme indécente. Quant aux chaussures qui laissaient une partie du pied à découvert, elles étaient communes aux deux sexes, comme en Grèce, sans autre différence, sinon que celles des femmes étaient plus légères que celles des hommes.
Les chaussures selon le statut de la personne
Dans les premières guerres de notre révolution, pour empêcher les soldats de vendre aux bourgeois les souliers qui leur étaient fournis, on distingua la chaussure des derniers par la pointe, tandis que les soldats portaient des souliers terminés carrément.
Chez les Romains, les magistrats et les empereurs portaient des souliers de soie rouge et aussi de toile de lin fort blanc, brodée et enrichie de perles et de diamants. C'est ainsi qu'en ont porté l'empereur Antonin, surnommé le Philosophe, et ses successeurs jusqu'à Constantin. Le commun des bourgeois romains avaient des souliers noirs, et les femmes des souliers blancs.
Les sénateurs portaient à leurs souliers, sur la cheville, et non sur le coude-pied, une espèce de boucle que Juvénal appelle luna, et d'autres lunula ; elle avait en effet la forme d'un croissant ou d'un C, qui marquait le nombre centenaire, parce qu'au commencement les sénateurs patriciens étaient au nombre de cent. Ces lunes ou boucles étaient ordinairement d'ivoire, et quelquefois d'or ou d'argent. Dans les cérémonies, les magistrats et les généraux portaient des souliers rouges ; les esclaves marchaient nu-pieds.
Les chaussures françaises
Nos anciens Français, dit le moine de Saint-Gall, avaient des chaussures dorées par dehors et ornées de courroies et de lanières longues de trois coudées ; telle était la chaussure de Charlemagne et de Louis-le-Débonnaire. Jean-Pierre Puricelli, dans ses Monuments de la basilique Ambrosienne, décrit la chaussure de Bernard, fils de Pépin, roi d'Italie, dont le corps y fut trouvé et levé de terre. « Ses souliers, dit-il, étaient encore entiers ; ils étaient de cuir rouge, et la semelle était de bois : ils étaient si justes, si bien faits à chaque pied et aux doigts de chaque pied, que le soulier gauche ne pouvait servir au pied droit, ni le droit au pied gauche, finissant en pointe du côté du gros doigt. »
Sous le règne de Philippe-le-Bel, on vit s'établir une chaussure bizarre qu'on nommait souliers à la Pouline, du nom de Poulin son inventeur ; elle finissait en pointe plus ou moins longue, selon la qualité des personnes : elle était de deux pieds pour les princes et les grands seigneurs, d'un pied pour les riches, et d'un demi-pied pour les gens du commun. C'est de là qu'est venu le proverbe, sur quel pied est-il ? Il est sur un bon pied. Quelquefois on l'ornait de cornes ou de griffes, ou de quelque autre figure grotesque.
La chaussure corioclave
M. Barnet obtint en 1816 un brevet d'importation pour la chaussure corioclave, dont un cordonnier de Philadelphie était l'inventeur. Dans cette chaussure, la semelle, au lieu d'être retenue au reste du soulier par du fil ciré, est fixée par de petites fiches en fer ou en cuivre, rivées en dedans, et disposées dans un ordre agréable à l'œil. La semelle, ainsi retenue, s'use en même temps que les fiches, sans pouvoir se détacher, et le soulier en dure plus longtemps.