L'origine de Commerce
Né de la nécessité
L'origine du commerce, dit Goguet, est presque aussi ancienne que celle des sociétés. L'inégalité avec laquelle les productions de la nature sont distribuées dans chaque pays a occasionné le premier trafic entre les hommes. On a commencé par des échanges de particulier à particulier. Insensiblement le commerce s'est étendu de proche en proche, de villes en villes, de provinces en provinces, de royaumes en royaumes ; il est enfin parvenu à réunir le monde entier. La nécessité a fait naître le commerce ; le désir de se procurer les commodités dont on manquait lui a fait prendre des forces et de l'accroissement ; la cupidité, le luxe, le goût du superflu, l'ont ensuite porté au plus haut degré de perfection.
L'Orient : le berceau du commerce
L'Orient paraît avoir été le berceau du commerce ; si nous remontons à l'histoire de Joseph, nous voyons que ses frères le vendirent à des marchands ismaélites. Cependant ce que l'histoire nous apprend du commerce des Égyptiens avant l'établissement d'Alexandrie se réduit à peu de chose, et jette dans l'esprit du lecteur beaucoup d'incertitude. Les premières opérations maritimes de Phénicie ne sont pas enveloppées des mêmes voiles que celles de l'Égypte. Il n'y avait rien dans le caractère et dans la situation des Phéniciens qui ne favorisât l'inclination commerçante.
Habitants d'une petite contrée de la Syrie, les Phéniciens osèrent les premiers franchir la barrière que les mers opposaient à leur cupidité, et s'approprier les denrées de tous les peuples. Les richesses de l'Orient, de l'Afrique et de l'Europe se rassemblèrent à Tyr et à Sidon, d'où leurs vaisseaux répandaient dans chaque contrée du monde le superflu des autres. La découverte de l'Espagne fut la principale source de leurs richesses. Outre les cotons, les laines, les fruits, le fer et le plomb qu'ils en tiraient, les mines d'or et d'argent de l'Andalousie les rendaient maîtres du prix des denrées de tous les pays.
Les principales régions antiques du commerce
Carthage, colonie des Tyriens, s'étendit le long des côtes occidentales de l'Afrique. Pour accroître même son commerce, et ne le partager qu'avec sa métropole, elle devint conquérante.
La Grèce cependant, par son industrie et sa population, vint à figurer parmi les puissances Corinthe, par sa situation, fut l'entrepôt des marchandises de l'Asie et de l'Italie ; mais ses marchands ne tentèrent aucune navigation éloignée.
Les habitants de Phocée, colonie d'Athènes, chassés de leur pays, fondèrent Marseille, sur les côtes méridionales des Gaules. Cette nouvelle république, forcée par la stérilité de son territoire de s'adonner à la pêche et au commerce, y réussit ; elle donna même l'alarme à Carthage, dont elle repoussa vigoureusement les attaques.
Alexandre parut ; il détruisit la ville de Tyr, et la navigation de la Syrie fut anéantie avec elle. Alexandrie, bâtie à l'entrée de l'Égypte, devint la clef du commerce des Indes et le centre de celui de l'Occident.
Le commerce sous l'empire romain
Enfin le génie de Rome prévalut : le commerce de Carthage fut enseveli sous ses ruines. Bientôt l'Espagne, la Grèce, l'Asie et l'Egypte à son tour furent des provinces romaines ; mais la maîtresse du monde dédaigna de s'enrichir autrement que par les tributs qu'elle imposait aux nations vaincues ; elle se contenta de favoriser le commerce des peuples qui le faisaient sous sa protection. Éblouis par la gloire des armes, les Romains, pendant près de 600 ans, auraient cru se dégrader en donnant leurs soins au trafic ; ils l'abandonnaient aux esclaves et aux affranchis. Le négoce en grand était cependant permis au peuple : les lois l'interdisaient aux sénateurs et aux patriciens.
Ce ne fut qu'après la destruction de Corinthe et de Carthage qu'ils commencèrent à tourner leurs vues du côté du commerce ; et vers la fin de la république le négoce avait pris un grand accroissement.
Après la chute de l'empire d'Occident
La chute de l'empire d'Occident par l'inondation des peuples du Nord, et les invasions des Sarrasins, entraîna aussi celle du commerce. Il s'anéantit, comme les autres arts, sous le joug de la barbarie ; réduit presque partout à la circulation intérieure, nécessaire dans un pays où il y a des hommes, il se réfugia en Italie. Ce pays conserva une navigation, et fit seul le commerce de l'Europe. Venise, Gênes, Florence, Pise, se disputèrent l'empire de la mer et la supériorité dans les manufactures.
En 1164, la ville de Brême s'associa avec quelques autres pour se soutenir mutuellement dans le commerce qu'elles faisaient en Livonie. La forme et les premiers succès de cette association promirent tant d'avantages, que toutes les villes d'Allemagne qui faisaient quelque commerce voulurent y être agrégées. En 1206, on en comptait soixante-deux, depuis Nerva en Livonie jusqu'au Rhin, sous le nom de villes hanséatiques. Plusieurs villes des Pays-Bas, de France, d'Angleterre, de Portugal, d'Espagne et d'Italie s'y incorporèrent. La hanse teutonique fit alors presque seule tout le commerce extérieur de l'Europe.
L'essor du commerce en France
En France, le commerce qui, sur la fin de la seconde race et au commencement de la troisième, avait été presque anéanti, reprit une nouvelle vie sous saint Louis. Henri-le-Grand, en 1597, lui donna un nouvel essor par l'établissement de plusieurs manufactures et par l'institution d'une chambre ou conseil du commerce ; mais il est vrai de dire que ce ne fut que sous Louis XIV que le commerce de France devint important, et que le ministre Colbert le fit fleurir dans toutes les parties du monde.