L'origine de Dessin
Une origine indéterminée
On ne peut rien dire de certain sur l'époque où cet art fut inventé ; on peut assurer seulement qu'il est de la plus haute antiquité. L'ombre que produit sur une surface qui lui est opposée tout corps placé entre cette surface et la lumière dont il est frappé a pu fournir la première idée du dessin ; on essaya ensuite de représenter les objets sans le secours de leur ombre ; peu à peu on accoutuma la main à se laisser guider par l'œil, et à suivre les proportions que la vue lui dictait. Le charbon et la craie donnèrent aux premiers hommes les moyens de dessiner sur le bois, sur la pierre. Le dessin ne consistait alors que dans la circonscription du contour des objets.
Le premier dessin motivé par l'amour
C'est à l'amour d'une jeune fille nommée Dibutade que l'on attribue le premier essai que la Grèce ait vu de l'art de dessiner.
L'Amour
Aux traits de l'ombre appliqua la peinture,
Et de sa flamme anima les pinceaux.
(Léonard, Les saisons)
Un de nos poètes s'est plu à décrire cette prétendue origine donnée à la peinture :
Eh quoi ! pendant huit jours, disait la tendre amante,
Je languirai sans Voir cette tête charmante !
0 mon cher Polémon, n'est-sil point de secrets
Qui puissent à mes yeux en conserver les traits !
Hélas ! il n'en est point ; ce n'est que dans mon âme
Que vont rester empreints ces objets de ma flamme.
Pour te voir, il faudra descendre dans mon cœur.
Ah ! que j'irai souvent y chercher mon vainqueur.
Mais, que vois-je ! c'est toi ! c'est Polémon lui-même !
Sur la blancheur du mur l'ombre a peint ce que j'aime !
Je pourrai voir au moins l'ombre de mon amant :
Loin de lui, c'est beaucoup. D'un charbon à l'instant,
Suivant tous les contours de cette ombre volage,
Elle attache à la pierre une si chère image.
Peintres, ce fut ainsi que votre art vit le jour :
Heureux fruit du hasard que sut cueillir l'amour.
Le père de cette jeune fille, potier de terre à Sicyone, ville du Péloponnèse, ayant considéré l'ouvrage de sa fille, imagina d'appliquer de l'argile sur ces traits, en observant les contours tels qu'il les voyait dessinés. Il fit par ce moyen un profil de terre qu'il mit à cuire dans son fourneau. Tel fut encore, suivant l'ancienne tradition, l'origine des figures en relief dans la Grèce. Il est vrai de dire cependant que le dessin et les arts qui y ont rapport n'ont commencé à y faire des progrès suivis que depuis l'arrivée de Cécrops ou de Cadmus, princes sortis de l'Egypte et de la Phénicie, pays où les arts qui concernent le dessin étaient connus de temps immémorial.
Le perfectionnement du dessin dans la Grèce antique
On peut se faire une idée du degré de perfection auquel ce genre de dessin fut porté, en jetant les yeux sur quelques vases étrusques extrêmement anciens. Les figures sont simplement contournées ou esquissées, c'est-à-dire qu'elles sont comme les figures dessinées doivent être. Ces dessins nous offrent, non seulement les contours des figures, mais ils rendent aussi la circonscription des parties, le jet, et les plis des draperies, ainsi que les autres détails, le tout par des lignes et des traits sans lumières et sans ombres.
Ce sont des dessins rendus avec des couleurs ; pratique qui n'est pas inconnue à nos dessinateurs modernes. Sur la plupart des vases, les figures sont peintes d'une seule couleur, ou, pour mieux dire, la couleur des figures est épargnée sur le fond même du vase, sur la couleur naturelle de la terre cuite la plus fine. Le dessin de la plupart de ces vases est tel, que les figures pourraient occuper une place avantageuse dans une composition de Raphaël. A en juger par le dessin, on-est obligé d'attribuer la plupart de ces morceaux à des artistes grecs. Winckelmann, dans son Histoire de l'art d'après les monuments, présente les vases étrusques comme des monuments propres à nous faire connaître le degré de perfection auquel les Grecs avaient porté l'art du dessin ; nos porcelaines les plus fines supporteraient à peine, dit-il, la comparaison avec ces vases, pour la légèreté et la richesse des dessins.
L'invention de l'art de profiler
Ardieès, natif de Corinthe, qui florissait en Grèce avant la guerre de Perse, fut, dit-on, le premier qui inventa le dessin, ou la manière de profiler et de contre-tirer avec le crayon et le simple trait, sans mélange de couleurs ; ce qui n'était à la vérité qu'un ouvrage fort imparfait.
Les Grecs avaient établi des espèces d'académies de dessin dans la plupart de leurs villes, où les enfants de condition libre qui avaient des dispositions pour la peinture, la sculpture et les autres arts, étaient élevés avec soin. Ces sortes d'académies, au rapport de Pline, étaient conduites par les plus habiles maîtres.
L'introduction du dessin dans la Rome antique
Quoique les arts de la Grèce n'aient passé à Rome que fort tard, et n'y aient été exercés d'abord que par des Grecs, on ne peut douter qu'il n'y ait eu dans la suite des écoles ou académies pour les élèves qui se destinaient à la peinture et aux autres arts qui sont fondés sur le dessin.