L'origine de Écriture
Une origine indéterminée
« On a successivement inventé, dit Goguet (De l'origine des lois, des arts, etc.), différents signes propres à représenter les discours et à exprimer la pensée. C'est aux recherches et aux tentatives multipliées qu'on a faites pour y parvenir en différents temps chez les peuples policés , que nous devons l'art d'écrire proprement dit, art dont il est impossible de pouvoir fixer précisément l'époque, et marquer exactement l'origine. »
Du dessin aux caractères alphabétiques
Il est certain que le premier moyen employé pour représenter une idée a été d'en peindre l'objet. La première écriture a donc été une peinture grossière. Les hiéroglyphes, dont l'invention est attribuée aux Égyptiens, sont venus abréger ce que la première peinture avait de trop long ; mais, en même temps qu'elle devenait symbolique, elle devenait aussi plus compliquée et elle dépendait en partie de conventions arbitraires.
Les caractères alphabétiques seuls pouvaient remplir exactement le but que les deux premières espèces d'écriture s'étaient proposé ; mais des deux premières à la troisième l'intervalle était d'autant plus grand, que ni la peinture ni les hiéroglyphes ne mettaient sur la voie de cette dernière découverte. La peinture et les hiéroglyphes étaient la représentation plus ou moins fidèle des objets ; l'écriture n'était que la représentation des sons ou des mots : c'était, s'il est permis de parler ainsi, la langue devenue sensible à l'œil ; et il fallait, pour opérer ce phénomène, distinguer la valeur des sons, les analyser, et imaginer des caractères purement de convention qui pussent parler aux yeux dans le même idiome ou la langue se ferait entendre à l'oreille.
L'écriture alphabétique
Il est impossible, dit encore Goguet, de déterminer avec précision l'époque à laquelle on doit rapporter l'invention des caractères alphabétiques : on voit seulement que cet art a dû être connu fort anciennement dans quelques pays. L'écriture alphabétique était en usage dans l'Arabie dés le temps de Job. Il en parle d'une manière très claire et très positive.
Différentes nations se sont disputé la gloire d'avoir inventé cette écriture ; mais on ne vois que deux peuples dans l'antiquité auxquels on puisse raisonnablement attribuer cette invention, les Assyriens, auxquels par la suite les Grecs ont donné le nom de Phéniciens, ou bien les Égyptiens. Tout nous dit que c'est à l'arrivée de Cadmus qu'on doit rapporter la connaissance des caractères alphabétiques dans la Grèce ; la comparaison de l'alphabet phénicien et de l'alphabet grec suffirait pour s'en convaincre. Il est visible, dit Goguet, que les caractères grecs ne sont que les lettres phéniciennes retournées de droite à gauche.
Ce qui semble assez certain, c'est que, quelques années après Cécrops, qui parut dans l'Attique. 1657 ans avant Jésus-Christ, Cadmus aborda en Béotie (1594 ans avant Jésus-Christ), et y apporta l'art de retenir par de simples traits les sons fugitifs de la parole.
Les différents supports d'écriture des Grecs
Les Grecs écrivaient d'abord sur des feuilles de fleurs, sur l'écorce de certains arbres, principalement du tilleul et du hêtre ; dans la suite, ils se servirent de petites planches ou tablettes de bois très minces, on les appelait tabellœ : on enduisait ces tablettes de cire et l'on écrivait sur cet enduit. Les Grecs écrivaient aussi sur des peaux de bêtes : c'étaient ou des cuirs passés et rendus souples comme la peau d'un gant, ou c'était du parchemin rouge et blanc ou du vélin semblable au nôtre. Cette dernière espèce était fort en usage.
Il y avait aussi des feuilles à écrire faites d'une petite peau déliée qui se trouvait entre l'écorce et le bois de certains arbres ; cette peau était appelée liber, d'où vient le mot livre. On en faisait aussi d'une plante égyptienne que les Grecs appelaient biblos et les Latins papyrus d'où est venu le mot papier : celles-ci étaient plus en usage que les autres.
Les supports d'écriture des Romains
Les Romains avaient appris l'art de l'écriture des Toscans et des Grecs. Ils furent longtemps sans connaître les lettres de l'alphabet ; et, si l'on en excepte un petit nombre, l'écriture ne fut en usage à Rome que vers le temps de l'expulsion des rois. Les Romains écrivaient, comme les Grecs, sur des peaux de bêtes préparées ; cet usage était très ancien, car Denys d'Halicarnasse nous apprend qu'un traité fait entre les premiers Romains et les Gabiens fut écrit en lettres antiques sur du cuir de bœuf dont on avait couvert un bouclier de bois.
Les Romains se servaient encore, pour cet usage, de parchemin, de feuilles et d'écorce de certains arbres, du papyrus qu'ils recevaient d'Egypte ; ils écrivaient aussi sur des tablettes enduites de cire appelées palimpsesta ou codicilli et sur de la toile de lin très fine.
Les caractères de l'écriture
Les anciens avaient deux manières de former les caractères de l'écriture ; l'une était pingendo, en peignant, à l'aide d'une petite canne de roseau appelé calamus les lettres sur des peaux préparées ou sur la membrane intérieure de l'écorce de certains arbres. L'autre manière était incidendo, en gravant les lettres sur des lames de plomb ou de cuivre, ou bien sur des tablettes de bois enduites de cire ; ils se servaient à cet effet d'un poinçon appelé stylus. Ils n'écrivaient ordinairement que sur un côté et laissaient en blanc la page du revers.
L'écriture dans les Gaules
Les arts et les sciences restèrent longtemps dans l'enfance parmi les Gaulois. Ces peuples barbares, plus guerriers que curieux d'instruction, connurent à peine l'écriture ; ils ne s'en servaient que dans le cours ordinaire de leurs affaires et pour régler leurs comptes : ils employaient alors les mêmes caractères ou lettres que les Grecs, quoiqu'ils ignorassent la langue de ces derniers.
Tacite (Mœurs des Germains), parle de plusieurs inscriptions gauloises trouvées sur les frontières de la Germanie et de la Rhétie, et observe qu'elles étaient écrites en caractères grecs. Après la défaite des Helvétiens, Celtes d'origine, les Romains trouvèrent dans leur camp des rôles écrits en lettres grecques : ces rôles contenaient un dénombrement exact de leur armée.
L'écriture chinoise
L'écriture des Chinois n'est pas comme la nôtre une représentation de la parole ; elle se lie immédiatement aux idées, ou plutôt le signe écrit, le mot articulé et l'idée se lient à la fois réciproquement les uns aux autres.
On sait que l'écriture chinoise est de toutes celle qui a le plus fidèlement retenu le caractère hiéroglyphique, ou plutôt elle n'est encore qu'un système d'hiéroglyphes plus ou moins bien conservés. (Des signes et de l'art de penser, par Degérando).