L'origine de Lettre

Les lettres ont été imaginées pour conserver les différents sons qu'on forme en parlant, et leur fonction est, suivant l'expression de Rollin, de les rendre fidèlement au lecteur comme un dépôt qui leur est confié.


Une invention égyptienne ou phénicienne

Les Égyptiens et les Phéniciens se sont disputé longtemps la gloire d'avoir inventé les caractères alphabétiques ; et l'on ne sait encore auquel de ces peuples elle doit être attribuée. L'Europe ignora les caractères de l'écriture jusque vers l'an du monde 2650, que Cadmus, passant de Phénicie en Grèce, donna aux Grecs la connaissance des lettres, connaissance qu'Evandre, deux cents ans après, communiqua aux Latins.
Du temps de Pline, tous les peuples connus se servaient des caractères grecs ; depuis, l'alphabet romain a prévalu, et il s'applique aujourd'hui à presque toutes les langues.


Lettre, épître, missive

L'usage d'écrire des lettres ou missives est aussi ancien que l'écriture. On ne peut douter que, dès que les hommes eurent trouvé cet art, ils n'en aient profité pour communiquer leurs pensées à des personnes éloignées. Nous voyons dans l'Iliade, Bellérophon porter une lettre de Praetus, roi d'Argos, à Iobatés, roi de Lycie.
Les lettres chez les Grecs et chez les Romains avaient, comme les nôtres, une formule générale et presque uniforme. Les Grecs commençaient par mettre au haut des lettres leur nom le premier, et ensuite celui de la personne à laquelle ils écrivaient ; après quoi ils ajoutaient des paroles de pure politesse qui, dans leur langue, signifiaient joie, prospérité, santé. Oublier cette formule, ou affecter de ne la point mettre, était une impolitesse et une insulte.
Les Lacédémoniens écrivaient leurs lettres sur des bandes de parchemin, et les roulaient sur un cylindre de bois. Ils les fermaient ensuite avec un fil noir sur lequel ils appliquaient leur cachet. Leurs lettres étaient si courtes que leur brièveté avait passé en proverbe. Ils n'avaient point de cachet particulier, ils prenaient ceux qu'ils voulaient ; les anneaux de fer qu'ils portaient au doigt leur en servaient ordinairement.
Les Romains imitaient les Athéniens dans la formule générale qu'ils employaient dans leurs lettres. Ils mettaient en titre leur nom et leur qualité, et ensuite le nom et la qualité de celui à qui ils écrivaient, en ajoutant ordinairement le mot salutem (salut). Mais lorsqu'ils écrivaient à un consul, à un dictateur ou à toute autre personne en place, ils observaient de commencer par mettre au haut de la lettre le nom et la qualité de celui à qui ils écrivaient, avant leur propre nom et leur qualité. Au contraire, lorsqu'un dictateur, un consul, un préteur écrivait à des inférieurs, il commençait par son nom et sa qualité. Toutes leurs lettres se terminaient par vale (portez-vous bien), sans autre compliment. Elles étaient la plupart écrites sur du papier appelé papyrus, fait d'une feuille de la plante de ce nom, qui croissait en Egypte.
Ils les pliaient simplement, ou les roulaient de façon que toutes étaient liées avec un fil sur lequel on appliquait de la cire pour y imprimer le cachet, à peu près comme nous faisons. Ainsi, pour ouvrir une lettre, il fallait couper le fil. Les lettres des généraux d'armées au sénat, pour les affaires importantes, étaient toujours scellées d'un double cachet, et celles par lesquelles ils annonçaient une victoire étaient entourées de branches de laurier. Ceux qui voulaient épargner le papier, qui était cher à Rome, écrivaient leurs lettres sur des tablettes enduites de cire, et les envoyaient cachetées ; en sorte qu'après avoir lu la lettre et l'avoir effacée avec le bout arrondi du stylet, on écrivait la réponse sur les mêmes tablettes qu'on renvoyait.
Les successeurs d'Auguste ne se contentèrent pas de souffrir qu'on leur donnât le titre de seigneur dans les lettres qu'on leur adressait, mais ils agréèrent qu'on joignît à leur nom les épithètes magnifiques de très grand, très auguste, très débonnaire. Dans le corps de la lettre, on employait les termes de votre clémence, votre piété, et autres semblables. Par cette nouvelle introduction de formules inouïes jusqu'alors, il arriva, dit un auteur contemporain, que le noble ton épistolaire des Romains, sous la république, ne connut plus, sous les empereurs, d'autre style que celui de la bassesse et de la flatterie.


Les lettres patentes

C'est ainsi qu'on appelait en chancellerie des lettres émanées du roi, qui étaient ouvertes, n'ayant qu'un seul repli au-dessous de l'écriture, repli qui n'empêchait point de lire ce qu'elles contenaient ; à la différence des lettres closes, appelées ensuite lettres de cachet.


Les lettres de cachet

Les lettres de cachet, appelées aussi autrefois lettres closes, ou clauses, lettres du petit cachet ou du petit signet du roi ; c'étaient des lettres émanées du souverain, signées de lui, et contre-signées d'un secrétaire d'état, écrites sur simple papier, et pliées de manière qu'on ne pouvait les lire sans rompre le cachet dont elles étaient fermées. On n'appelait pas lettres de cachet toutes les lettres missives que le prince écrivait selon les occasions ; mais seulement celles qui contenaient quelque ordre, commandement ou avis de la part du prince.
Ces sortes de lettres étaient portées à leur destination par quelque officier de police, ou même par quelque personne qualifiée, selon les personnes auxquelles la lettre s'adressait. Celui qui était chargé de la remettre faisait une espèce de procès-verbal de l'exécution de sa commission, en tête duquel la lettre était transcrite, et, au bas, il faisait donner à celui qui l'avait reçue, une reconnaissance comme elle lui avait été remise ; ou, s'il ne trouvait personne, il faisait mention des perquisitions qu'il avait faites. L'objet des lettres de cachet était souvent d'envoyer quelqu'un en exil, ou de le faire enlever et constituer prisonnier, ou d'enjoindre à certains corps politiques de s'assembler et de faire quelque chose, etc.
Le plus ancien exemple que l'on trouve des lettres de cachet, en tant qu'on les employait pour exiler quelqu'un, est l'ordre qui fut donné par Thierry ou par Brunehaut contre saint Colomban, pour le faire sortir de son monastère de Luxeuil, et l'exiler dans un autre lieu, pour y demeurer jusqu'à nouvel ordre.
Il paraît que ces sortes de lettres furent une arme redoutable dans les mains du cardinal de Richelieu, qui s'en servait pour écarter ceux qu'il jugeait lui être contraires. Ce fut, dit-on, le père Joseph qui lui suggéra d'employer ce moyen ; ce fut encore, à ce qu'on prétend, ce capucin, si fameux sous ce ministère, qui imagina les espions soudoyés par la police.
Les historiens s'accordent à accuser le cardinal de Fleury, quoique d'un caractère doux et pacifique, d'avoir décerné trente à quarante mille lettres de cachet pour cause de jansénisme. Louvois en avait décerné quatre-vingt mille pour cause de protestantisme.


Les lettres de change

C'est aux juifs que l'on doit l'invention des lettres de change, et ce sont les Italiens et les négociants d'Amsterdam qui en ont établi l'usage en France. Bannis de ce royaume, sous Philippe-le-Long, en 1318, les juifs se réfugièrent en Lombardie, y donnèrent aux négociants des lettres sur ceux à qui ils avaient confié leurs effets en partant, et ces lettres furent acquittées. L'invention admirable des lettres de change naquit du désespoir, et alors seulement le commerce put éluder la violence, et se maintenir dans toutes les parties du monde.
La plus ancienne ordonnance qui fasse mention véritablement de lettres de change, c'est-à-dire de lettres tirées de place en place, est l'édit donné par Louis XI, au mois de mars 1462, portant confirmation des foires de Lyon.
Avant le ministère du cardinal de Richelieu on ne se servait pas du mot d'ordre (payez à l'ordre de M. ...); mais l'embarras des procurations qu'il fallait passer donna lieu à ce terme, qui facilite le commerce des lettres de change.

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