L'origine de Question
Torture que l'on employait pour faire avouer à l'accusé le crime dont il était prévenu, ou pour avoir la révélation de ses complices. Ce genre de tourment a été appelé question, parce qu'à mesure que l'accusé l'éprouvait il était interrogé sur les circonstances du délit dont il était prévenu. La manière de donner la question variait selon les lieux ou les usages ; elle était ordinaire ou extraordinaire, c'est-à-dire plus ou moins barbare et inhumaine.
Dès l'antiquité greco-romaine
L'usage de la question était inconnu aux Juifs ; les lois de Moïse n'en parlent pas ; il est cependant fort ancien, puisqu'il était établi chez les Grecs. Trente jours après la condamnation d'un criminel, on lui donnait la question : les citoyens d'Athènes ne pouvaient y être appliqués que pour crime de lèse-majesté.
Chez les Romains, la naissance, la dignité, et la profession de la milice, garantissaient de la question, mais on exceptait, comme à Athènes, le crime de lèse-majesté. Ce qu'il y a d'étrange, c'est qu'on la donnait quelquefois à des tiers, quoique non accusés, sous prétexte d'acquérir des preuves du crime et des coupables. Si un citoyen était tué dans sa maison, on mettait tous ses esclaves à la torture.
Les restrictions à la question
Les Wisigoths furent les premiers qui mirent des restrictions à la question. Suivant la loi salique, on la donnait seulement aux esclaves. Nos anciennes ordonnances portent que les nobles de Champagne et les capitouls de Toulouse seront exempts de cette affreuse épreuve, sinon pour crime qui mérite la mort.
En France, on ne donnait pas la question en matière civile, mais seulement en matière criminelle. Suivant l'ordonnance de 1670, ou peut appliquer à la question un homme accusé d'un crime capital, s'il y a preuve considérable, et que cependant elle ne soit pas suffisante pour le convaincre. Les dangers de la question ont été prouvés dans une foule d'ouvrages ; mais il n'en est point qui présente des détails plus effrayants sur cette coutume barbare que l'Essai sur l'histoire générale des tribunaux, par M. des Essarts.
L'auteur rapporte, dans le sixième volume, à l'article torture, les différentes manières dont on donne la question chez tous les peuples de l'univers ; il rappelle ensuite les exemples les plus frappants des méprises fatales qui n'ont exposé que trop souvent l'innocence à partager les tourments réservés au crime. Ce qu'il y a encore de plus intéressant dans cet article, c'est le développement des motifs qui ont déterminé la plupart des gouvernements de l'Europe à proscrire l'usage de la question.
L'abolition de la question
Déjà depuis longtemps les âmes sensibles gémissaient de voir subsister dans notre Code pénal cette pratique cruelle et dangereuse, que La Bruyère appelle une invention merveilleuse et tout-à-fait sûre pour perdre un innocent qui a la complexion faible, et sauver un coupable qui est né robuste. Déjà la Hollande et l'Angleterre avaient supprimé la question préparatoire, lorsqu'elle fut abolie en France, par déclaration du roi Louis XVI, du 24 août 1780, enregistrée au parlement le 5 septembre suivant.