L'origine de Repas


Les repas dans la Grèce antique

Les Grecs faisaient, dans les temps héroïques, ordinairement deux repas par jour, l'un à midi et l'autre le soir ; ce dernier était le plus fort et le plus considérable. On servait les viandes toutes coupées, et chaque convive avait sa portion marquée, qu'on lui présentait séparément. Dans les siècles héroïques, les Grecs mangeaient assis et non couchés sur des lits, comme la coutume s'en introduisit par la suite. On présume qu'alors ils n'aimaient pas à passer le nombre de dix à table ; on connaît ce proverbe de Théognis, qui dit que dans un repas bien ordonné le nombre des convives ne doit jamais être au-dessous de celui des Grâces et jamais au-dessus de celui des Muses.
Les femmes ne mangeaient point avec les hommes. Les convives étaient dans l'usage de boire à la santé les uns des autres, et l'on faisait dans la joie, souvent bruyante, circuler les coupes. En général les Grecs cherchaient par tous les moyens, soit par des discours sérieux ou la plaisanterie, soit par des chants et le jeu des instruments, à entretenir la gaieté des convives. On ne connaissait point alors d'autres viandes que le bœuf, le mouton, le porc et la chèvre, qu'on faisait rôtir sur les charbons ; c'était une délicatesse d'en manger autrement.
Les Lacédémoniens ne prenaient jamais de repas en particulier dans leurs maisons : ils avaient des salles publiques, où ils mangeaient en commun. Par cet établissement des repas publics et cette frugale simplicité de la table, Lycurgue fit changer en quelque sorte de nature aux richesses, en les mettant hors d'état d'être désirées, d'être volées, et d'enrichir leurs possesseurs. Rollin rapporte que les riches furent extrêmement irrités de cette ordonnance, et ce fut à cette occasion que dans une émeute populaire un jeune homme, nommé Alcandre, creva un œil à Lycurgue d'un coup de bâton.
Les tables étaient d'environ quinze personnes ; chacun apportait par mois un boisseau de farine, huit mesures de vin, cinq livres de fromage, deux livres et demie de figues, et quelque peu de leur monnaie pour l'apprêt et l'assaisonnement des vivres. On était obligé de se trouver au repas public ; et, longtemps après, le roi Agis, au retour d'une expédition glorieuse, ayant voulu s'en dispenser pour manger avec la reine son épouse, fut réprimandé et puni. Minos avait de son côté établi dans la Crète la communauté des tailles et des repas, mais c'était le public qui fournissait aux dépenses. Ainsi femmes, enfants, hommes faits, vieillards, tous étaient nourris au nom et aux dépens de la république ; en quoi Aristote donne la préférence aux repas de Crète sur ceux de Sparte, où les particuliers étaient obligée de fournir leur quote-part.
Il y avait à Athènes des repas publics et des repas particuliers : les premiers n'étaient pas communs à tous les citoyens, comme à Lacédémone ; c'était au contraire une grande distinction que d'y être admis. Ces repas se faisaient dans un superbe édifice, appelé Prytanée, du nom de la place publique où il était bâti : ou y servait tous les jours, aux dépens de la république, plusieurs tables où l'on ne recevait que ceux à qui les Athéniens avaient accordé ce privilège, en récompense des services signalés qu'ils avaient rendus à la patrie dans la paix ou dans la guerre. Dans le commencement, les repas particuliers des Athéniens furent très simples ; mais lorsque Athènes eut étendu ses conquêtes en Asie, lorsque son commerce lui eut fourni ce qu'il y avait de plus rare et de plus exquis chez les étrangers, elle se livra sans réserve à son penchant pour les plaisirs et pour la bonne chère.


Les repas dans la Rome antique

Si l'on en excepte les enfants, les vieillards et les ouvriers, qui mangeaient plusieurs fois le jour, l'usage constant à Rome était de ne faire qu'un repas sur les quatre heures du soir ; ce repas s'appelait cœna (cène) ; car si l'on prenait quelque chose vers midi, ce léger dîner, appelé prandium, ne peut être regardé comme un repas, puisqu'il ne consistait qu'en un morceau de pain sec ou en quelques fruits.
Dans les premiers temps, les Romains mangeaient assis sur des bancs de bois rangés autour de la table : ils ne vivaient alors que de laitage, d'œufs, de légumes, qu'ils apprêtaient eux-mêmes ; mais dans la suite le luxe et les richesses ayant corrompu ces mœurs antiques, la prodigalité et la délicatesse s'introduisirent dans les repas, et ils empruntèrent des Asiatiques et des Grecs l'usage de manger sur des lits, où ils étaient à demi couchés sur le côté gauche, le coude appuyé sur un coussin ou un oreiller. On servait les viandes, non pas toujours chaque plat séparément, mais plusieurs ensemble. Ces sortes de repas n'étaient qu'à deux services, qui s'appelaient primœ mensœ et secundœ mensœ : le premier se nommait gustatio, et commençait toujours par des œufs frais, accompagnés de salades, de laitues, d'olives, d'huîtres, et d'autres choses propres à aiguiser l'appétit ; on n'y buvait point de vin, mais de l'hydromel. Le second service formait proprement le repas ; le mets principal se nommait caput cœnœ. Ce service consistait en volaille de basse-cour et en viandes plus solides, comme du mouton, du porc, dont ils faisaient des grillades avec lesquelles ils servaient des fruits secs et crus. On servait au dessert des fruits crus, cuits ou confits, et surtout des raisins qu'on avait le secret de conserver frais toute l'année, avec des pâtisseries légères appelées dulciaria, bellaria, et d'autres friandises semblables.
Il y avait uue foule de domestiques occupés de la cuisine et du service de la table ; de ce nombre étaient le maître-d'hôtel (structor), le découpeur et écuyer tranchant (carptor), et autres. Aux temps du grand luxe des Romains, on était très curieux d'excellents cuisiniers. Pour les repas du soir, on choisissait un rex ou magister convivii, auquel on s'en rapportait, surtout pour ce qui regardait la manière de boire et l'entretien de la société. Le souper achevé, on prolongeait le banquet (commestatio) bien avant dans la nuit, et on portait des santés, dont les premières étaient toujours en l'honneur des dieux et des héros dont on descendait.


Les repas en France

Cette frugalité qu'on remarque chez ces anciens peuples a incontestablement régné chez les Francs et chez les Gaulois ; car ce n'est que par la suite, et lorsque la civilisation a fait des progrès sensibles, que la délicatesse et le luxe s'emparent des différentes classes de la société. Il nous paraît assez inutile de dire ici quel degré de raffinement a acquis la cuisine française ni la réputation trop bien méritée dont elle jouit chez les étrangers, qui conviennent qu'on ne mange bien que dans ce pays : nous nous bornerons à faire remarquer les changements qui ont été apportés dans les heures de nos repas.
Nos aïeux dînaient à dix heures du matin, et ce repas très léger était à bien dire le déjeuner d'aujourd'hui ; plus d'un siècle après, on a dîné à onze heures, et cette heure était encore, au milieu du XVIIIe siècle, celle du dîner des collèges, des artisans et de la petite bourgeoisie, surtout dans les provinces. Au XVIe siècle et au commencement du XVIIe , les bons bourgeois de Paris et la bonne société dînaient encore à midi : c'était l'heure de Louis XIV ; les courtisans qui allaient lui faire la cour étaient obligés de dîner plus tard. Dans les provinces, à Lyon, à Bordeaux, à Lille, la bonne compagnie dînait encore, au XVIIIe siècle, à une heure, et le petit bourgeois à midi ; les gens de cour étaient les seuls qui dînassent à deux heures ; mais dès avant la révolution, le bourgeois avait adopté cette heure, et les grands dînaient à trois.
Le souper a suivi les mêmes progressions : on a soupé à cinq, six, sept, huit et neuf heures ; dans les grandes maisons et dans la bonne bourgeoisie on a même soupé à dix heures. Enfin après la révolution l'usage s'est établi chez les grands et dans la haute bourgeoisie de ne dîner qu'à cinq ou six heures ; mais on faisait à onze heures ou midi un déjeuner plus solide que celui qui avait lieu auparavant, déjeuner que l'on appelait à la fourchette, parce que comme on y mangeait de la viande on était obligé de se servir de cet instrument, tandis que ceux qui déjeunaient précédemment ou qui déjeunaient encore avec du thé, du café ou du chocolat, n'avaient besoin que d'une cuillère. Mais les journaliers et les gens de la campagne avaient généralement conservé l'usage de dîner à deux heures ; aussi déjeunaient-ils à neuf et soupaient-ils à huit ou neuf heures du soir. Quant à ce dernier repas, il paraissait proscrit par la bonne société.
Du temps de François Ier, on dînait à neuf heures du matin et l'on soupait à cinq heures du soir, suivant cette rime :

Lever à cinq, dîner à neuf,
Souper à cinq, coucher à neuf,
Fait vivre d'ans nonante neuf.

Sous Louis XII, on dînait à huit heures du matin ; mais, pour plaire à sa dernière femme, ce roi changea ce régime, et dîna à midi ; et, au lieu de se coucher à six heures du soir, il se couchait souvent à minuit. Ce régime nouveau ne fit pas fortune à la cour de France ; on continua, après la mort de ce roi, à dîner de neuf à dix du matin, et à souper à cinq ou six heures du soir.
Sous Henri IV, la cour dînait à onze heures du matin ; sous Louis XIV, à la même heure.

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