L'origine de Vapeur
Les machines à vapeur
Le jeu des machines à vapeur est fondé sur deux principes, le développement de la force élastique de la vapeur aqueuse par la chaleur, et sa précipitation subite par le refroidissement. L'utilité de ces machines est aujourd'hui universellement reconnue ; les applications multipliées qu'elles offrent des principes les plus délicats de la théorie de la chaleur méritent que nous en parlions avec quelque détail.
L'exécution des machines à vapeur a eu, comme celle des autres machines, ses différentes époques auxquelles répondent successivement de nouveaux degrés de perfection. Tous les mouvements de la machine à vapeur tirent leur origine du jeu d'un piston qui s'élève et s'abaisse alternativement dans un tuyau cylindrique en communication avec une chaudière où la vapeur se forme par l'action du feu que l'on entretient en dessous. La manière dont la vapeur contribue au jeu du piston varie suivant les différentes méthodes. Il paraît que, dans l'origine, on avait seulement pensé à employer le ressort de la vapeur comme moteur. Mais l'idée plus ingénieuse de condenser la vapeur par le refroidissement pour opérer le vide, ne remonte qu'en 1696 ; elle est attribuée communément à un Anglais nommé Savery ; il paraît néanmoins que deux autres Anglais en sont les véritables inventeurs, Newcomen et Cowley. Savery, en s'associant Newcomen, s'empara de sa découverte, et son ambition éclipsa bientôt l'homme simple et modeste qui bornait la sienne à bien faire.
Watt de Glascow et Bolton de Birmingham ont fait de nombreuses améliorations à la machine de Newcomen ; les plus remarquables sont d'avoir employé l'élasticité de la vapeur comme puissance active, et de l'avoir condensée hors du cylindre. Il est une infinité d'autres améliorations qui ont été introduites dans les machines à vapeur et dont on peut voir la description dans la Nouvelle architecture hydraulique de M.de Prony, ainsi que dans le Traité des machines de M. Hachette. Il y a des machines à vapeur qui ont la force de vingt, trente, soixante chevaux ; la plus forte que l'on ait connu existait, à ce qu'on assure, dans les mines de Cornouailles. Elle avait une puissance de mille dix chevaux, et elle servait à épuiser par des pompes l'eau d'une mine de cent quatre-vingts mètres de profondeur. Il est clair que cette puissance est la seule chose à évaluer ; car on peut ensuite l'appliquer à élever l'eau, à faire tourner des bobines dans des filatures, à mouvoir des rames, ou à tel autre usage qui exige une force active. M. Perkins, habile mécanicien anglais, qui faisait journellement des applications nombreuses de la puissance de la vapeur, a adapté ce moteur aux armes à feu.
Les bateaux à vapeur
Une lettre de M. Edw. Church, insérée dans la Bibliothèque universelle (novembre 1822), donne sur l'invention des bateaux à vapeur et sur ses progrès des renseignements fort précieux, et nous ne croyons pouvoir mieux répondre à la curiosité des lecteurs, que de donner ici un extrait de cette lettre.
« L'idée d'appliquer l'action de la vapeur à faire marcher des embarcations a dû naître avec les premières notions de l'existence de cette force. Ce fut sous le règne de Charles II (en 1663) que le marquis de Worcester fit paraître sa Centurie d'inventions, ouvrage dans lequel l'idée-mére de la machine à vapeur est énoncée, mais en façon d'énigme ; et en 1737, Jonathan Hulls, de Londres, publia la description d'un bateau à vapeur avec lequel il propose de touer des navires, etc. Il résout en même temps divers problèmes de mécanique et de pneumatique, dans le but de montrer que son projet est exécutable. Depuis l'époque déjà très ancienne de l'apparition de cet ouvrage, on avait cherché vainement en France, en Angleterre et en Ecosse, à réaliser le projet de Hulls ; et cette belle et utile conquête était réservée au génie de Fulton. En 1804, il résidait à Paris, occupé de meubler sa tête de connaissances utiles. A cette époque le chancelier Livington fut nommé ministre plénipotentiaire des États-Unis auprès du gouvernement de France. Protégé par ce chancelier, Fulton poursuivit son projet d'employer la puissance prodigieuse de la vapeur à faciliter la navigation, avec cette ardeur qui le distinguait ; et bientôt (en 1805) il fit son premier essai sur un petit bateau en cuivre sur la Seine, en présence de quelques membres de l'Institut de France. L'expérience (et il est aisé de le prévoir) ne réussit pas en tous points ; mais elle servit au moins à convaincre Fulton de la possibilité de l'application qu'il avait en vue ; il n'hésita point en conséquence à donner des ordres en Angleterre pour la construction d'une grande machine à vapeur ; il partit bientôt après pour faire préparer dans les États-Unis l'embarcation destinée à le recevoir ; et la parfaite réussite de cette grande expérience est connue du monde entier. »
L'Espagne revendique aussi l'honneur d'avoir inventé les bateaux à vapeur. En 1543, au rapport de quelques historiens, Blasco de Garay, capitaine de navire, proposa à Charles-Quint de faire marcher un bâtiment sans rames et sans voiles. L'empereur accepta, malgré l'avis contraire qu'avaient émis ses ministres, et l'essai ayant réussi, l'inventeur fut noblement récompensé. L'appareil consistait en une chaudière d'eau bouillante dont la vapeur mettait en mouvement deux roues appliquées sur les flancs du vaisseau. Après la mort de Charles-Quint, Garay n'ayant point trouvé de protecteur, sa découverte resta oubliée pendant des siècles.
L'Amérique vers le XIXe siècle la première à remettre en valeur cette branche importante d'industrie commerciale. L'Angleterre a bientôt imité sa rivale d'outre-mer, et la France n'a point tardé à se mettre en rapport avec elles.
Nos communications intérieures sont singulièrement facilitées par cette invention nouvelle. La Loire, la Gironde, le Rhône et la Seine avaient leurs flottes à vapeur. C'est de Nantes que sont venues à Paris les gondoles pavoisées où quatre à cinq cents personnes pouvaient tous les jours aller visiter les bois de Saint-Cloud.
La Hollande, l'Allemagne, la Suède et la Russie avaient leurs bateaux comme les nôtres, et ces machines, qui naviguaient dans toutes les mers, et qui bravent également les vents et les orages, lièrent les empires et les mondes, et rendirent tous les jours les communications plus faciles et plus fréquentes.
Les bains de vapeur
Quoique les voluptueux Romains et plusieurs nations orientales eussent déjà fait usage des bains de vapeur, et quoique dans tous les temps on eût eu recours aux étuves humides formées par la main de la nature en différentes contrées, telles que celles du royaume de Naples indiquées par le docteur Attumonelli, cependant on ne connut guère ces bains en France qu'à l'époque où Sanchez et le Suédois Martin donnèrent la description de ceux qui sont usités chez les Russes et les Finlandais. On ne tarda pas à les préconiser outre mesure, et à les mettre bien au-dessus de ceux des anciens, parce que c'était alors la mode d'estimer tout ce qui venait d'un pays naguère inconnu et tout nouvellement encore placé au rang des premiers états de l'Europe par le plus surprenant des génies.
Mais peu à peu l'enthousiasme se refroidit. La grossièreté du procédé employé par les Russes, et qui différait à peine de celui des sauvages du nord de l'Amérique, fit tomber les bains de vapeur dans un oubli que rendit plus profond le silence gardé à leur sujet, dans son précieux ouvrage, par Marcard, qui jusque là n'avait pas eu occasion de faire des expériences sur leurs effets immédiats. Cependant les judicieuses remarques que cet habile observateur inséra dans ses Essais de médecine, jointes aux écrits de son compatriote Nicolaï, de l'Anglais Symmons et du Français Doppet, réveillèrent l'attention générale. Les bains de vapeur devinrent principalement communs en Angleterre. Ils s'introduisirent aussi en France, où des corrections successives faites aux appareils destinés à leur administration, portèrent ceux-ci à un haut point de perfection. Les belles expériences du docteur Delaroche et de divers autres praticiens, mirent dans tout leur jour les propriétés hygiéniques et le mode d'action des fumigations aqueuses. (Journal universel des sciences médicales, 1816)
Une expression introduite en France vers le XVIIe siècle
On prétend que ce fut un certain abbé Ruccelaï, fils d'un fameux partisan sous Louis XIII, né à Florence d'une famille alliée aux Médicis, qui le premier apporta les vapeurs en France, ou, pour mieux dire, qui le premier mit à la mode le mot vapeurs, pour désigner ce malaise, ces inquiétudes, compagnes ordinaires de la mollesse et du désœuvrement. Cet abbé, que le maréchal d'Ancre avait introduit à la cour de France, s'y fit remarquer par son luxe et sa mollesse ; il mourut en 1628.