L'origine de Satire
La différence entre la satire et la comédie
Espèce de poème dont le but est de peindre les travers ou les vices des hommes. La satire diffère de la comédie en ce que celle-ci ne combat qu'indirectement, tandis que l'autre attaque en face. La satire, est-il dit dans la Petite encyclopédie poétique, admet tous les tons ; c'est même cette variété qui en fait le mérite : elle peut être tout à la fois noble et badine, légère et vigoureuse.
L'étymologie du mot Satire
« Satire, vient du mot satura, qui, dans les auteurs de la plus ancienne latinité, signifiait un mélange de toutes sortes de sujets. Dans la suite on l'appliqua plus particulièrement aux ouvrages qui avaient pour objet la raillerie et la plaisanterie. Enfin Ennius et Lucilius déterminèrent la nature de ce genre d'écrire, et l'on ne donna plus le nom de satires qu'aux poésies dont le sujet était la censure des mœurs. » (La Harpe)
Il est un art charmant d'amuser et de rire ;
Il faut de sel attique égayer la attire.
L'adresse est de choisir le trait qu'on doit lancer :
Qu'il effleure en volant, et pique sans blesser.
(Lebbus , Épître sur la bonne et la mauvaise plaisanterie)
La satire, en leçons, en nouveautés fertile,
Sait seule assaisonner le plaisant et l'utile,
Et d'un vers, qu'elle épure aux rayons du bon sens,
Détromper les esprits des erreurs de leur temps.
Elle seule, bravant l'orgueil et l'injustice,
Va jusque sous le dais faire pâlir le vice,
Et souvent sans rien craindre, à l'aide d'un bon mot,
Va venger la raison des attentats d'un sot.
(Boileau, Satire)
La satire dans l'antiquité gréco-romaine
Dans l'origine la satire n'était qu'une espèce de chanson en dialogue, dont tout le mérite consistait dans la vivacité des reparties. Les Romains durent aux Toscans la connaissance de ce genre de poésie, qui avait été cultivé par les Grecs, chez lesquels ce qu'on nomma tragédie satirique était une petite pièce qui se jouait après la tragédie pour délasser l'esprit des spectateurs de la sérieuse attention qu'ils avaient donnée à la représentation tragique ; c'était une espèce de divertissement, où l'on voyait d'un côté une aventure remarquable d'un héros, et de l'autre les railleries et les plaisanteries de Silène et des satyres.
Les Romains imitèrent ces pièces satiriques dans leurs atellanes. Après avoir éprouvé divers changements, soit sur le théâtre, soit par le mélange de la prose avec les vers ou par celui des différents vers, le poète Lucilius fixa l'état de la satire, et lui donna la forme dans laquelle Horace, Perse et Juvénal nous l'ont présentée depuis.
La satire en France
Quoiqu'on puisse regarder les ouvrages de Rabelais et la Bible Guyot, qui n'est qu'une critique mordante de tous les états dans le commencement du XIIe siècle, comme de véritables satires, Mathurin Régnier, né à Chartres, et mort à Rome en 1613, passe pour notre plus ancien poète satirique. Peu de temps avant la mort de Régnier, Lafrenaye-Vauquelin publia quelques satires, mais où l'on ne trouva ni la force ni le feu de celles du premier.
Soixante ans environ après Régnier, Boileau se servit de cette arme redoutable pour attaquer les vices en général et les mauvais auteurs en particulier, et laissa loin derrière lui ceux qui l'avaient précédé dans la carrière. Gilbert parut ensuite, et fit voir de quel style brûlant un homme profondément blessé des ridicules et des vices de son siècle sait les peindre et les attaquer. Ce que nous avons de lui suffit pour motiver les regrets que laisse la mort de ce jeune poète, trop tôt enlevé aux lettres dont il eût été un des principaux ornements.